CR Marathon de Paris

Dimanche 6 avril 2008

Or donc, nous y voilà. Après une bonne prépa en béton , je m'aligne au départ de cette mecque parisienne de la course à pied. A 35 000 coureurs, le marathon de paris, c'est l'usine. Bon, après tout ça me va aussi, je suis passé par là à mes débuts, en 1994, et je ne regrette rien. C'est très bien comme ça.

Assez inquiet au sujet de la météo (certains sites web annoncent des giboulées de neige...) je prévois néanmoins de voyager léger. Une carline manches courtes et c'est marre. Je n'oublie pas les gants cyclistes, qui réchauffent les mains en cas de froid et permettent de s'éponger en cas de chaud. Juste avant le départ, je prends un ultime double café au bistrot et profite des toilettes. Une cliente - une habituée du troquet? - apprécie moyennement la file de coureurs, tous consommateurs il est vrai, qui défile au petit coin. Elle me paraît bien excitée, elle devrait peut-être consulter, ou boire une bonne bière. Ah mais oui, mais la bière ça fait pisser. C'est peut-être son problème d'ailleurs.

Rendez-vous sur la ligne de départ. Je suis dans le sas "3h00", et ça tombe bien, c'est mon objectif. Je ne vais pas me plaindre, je suis à 30 mètres de l'arche de départ, il y a de la place, c'est royal. 5 minutes avant le coup d'envoi, je jette le vieux blouson pourri que j'avais enfilé pour me protéger du froid avant le départ, le laisser là ou le filer à Emmaüs, ça revient plus ou moins au même. Coup de pot, mon cardio accepte de fonctionner avant le départ (c'est rare...) et je constate, ce qui est classique, que je bats 20 à 30 pulsations au-dessus de mon rythme normal au repos. La pression monte...

PANG! C'est parti. J'ai décidé de faire la course "au cardio". Après mon mini-naufrage au Marathon des Yvelines je ne veux pas partir trop vite. Objectif, tenir à 150 pulsations voire un brin plus, mais ne jamais monter à 160. Le rythme obtenu sera une surprise...

Je passe le premier kilomètres en franchement plus de 4 minutes. Logique avec le piétinement du départ. Très rapidement je me rapproche des 4 minutes en question. Je sais que c'est trop vite. Mais bon je suis plutôt bien et j'ai vraiment du mou. Je reste très constant autour des 153 pulsations/minute, on est loin du grand effort. Ceci dit, pour un coureur d'ultra besogneux comme moi, j'ai l'impression de voler, et d'allonger la foulée comme pas permi. Les 10 kilomètres passent en environ 41 minutes. Toujours au-dessus de la moyenne finale prévue, mais bon, j'ai le sentiment qu'il y a peu de chances que j'explose complètement. Je continue sur ma lancée, l'idée est de tenir comme ça jusqu'au semi, et après de m'autoriser à monter à 160 s'il y a lieu.

Juste avant de rentrer dans le bois de Vincennes, j'aperçois une fanfare connue, les Khuseks. Je fais un petit coucou, genre "c'est mou" beuglé comme il se doit, et on me répond très logiquement "à poil". Ni une ni deux, je baisse mon short et montre mon cul (quel finesse...). Sur ce j'ai un écho "allez Darty!!!". Ca y est, ils m'ont reconnu. Dans le bois il y un stand "ne piétinnez pas les autres" qui milite pour le Tibet libre, si j'ai bien suivi. Bon moi les jeux olympiques de Pékin, je n'irai pas ni ne les regarderai mais ça ne me changera pas beaucoup je n'y vais jamais ni ne les regarde, les JO en tant que machine commerciale écoeurante étant à l'opposé de ma conception du sport, quel que soit le pays qui les organise. Si ç'avait été en France en 2012 je me serai payé des vacances ailleurs.

Arrive le semi donc. Le passage du périph' et la rentrée dans paris sont particulièrement agréables, il y a une belle haie d'honneur de spectateurs assez resserée, on est à la fête! Je dois passer au semi dans les 1h26'. Les temps sont à confirmer, au moment où j'écris ces lignes le site du marathon est H.S. et le service SMS "envoi des temps de passage" n'a manifestement pas marché pour moi. Je suis clairement en avance sur l'objectif, mais attention, la dernière fois aussi, et j'ai complètement dérivé entre le 25ème et le 35ème. Donc l'objectif est de rester lucide et concentré, et ne pas lâcher la pression.

Pas trop difficile, je suis sur mon rythme, et j'ai encore du jus. J'ai pris soin, cette fois, de ne pas snober les ravitaillements, ça a peut-être été une erreur à Rambouillet. J'ai beau courir des ultras, ici, la calorie part vite, le moteur aspire du carburant plein pot. Donc je prends un quart de banane et quelques gorgées d'eau tous les 5 kilomètres. J'ai commencé ce rythme à partir du 10ème et je le tiendrai jusqu'à la fin. En revanche coup de gueule contre l'organisateur. Au prix où on paye on pourrait avoir du coca (ou du pepsi, ou du breizh cola, m'en fous) aux ravitos, là il n'y a que de l'eau, franchement, c'est exagéré. Putains de sponsors à la con.

J'arrive au 28ème. Ce kilomètre est important car, un proverbe que j'aime bien dit "l'endurance, ça commence aux deux tiers". Et comme 28 * 3 / 2 = 42 on y est aux deux tiers, à 195 mètres près. Donc on peut rajouter la moitié de son temps au chrono en cours, et on a une estimation de l'heure d'arrivée. En théorie. Dans la pratique je suis largement en dessous des deux heures. Yabon. Au passage, entre deux tunnels, je fais chat bite un écureuil du crédit agricole, le pauvre n'avait aucune chance de me rattraper avec son déguize, hi hi hi. Je suis incorrigible. Certains spectateurs sont amusés et d'autres, vraisemblablement, consternés.

Je continue. Les montées descentes des quais de Seine m'ont un petit peu entamé - ça se traduit surtout par un ralentissement d'allure car je garde le même rythme au cardio - et donc je perds du terrain sur mon rythme initial. On entame la montée pénible dans le 16ème arrondissement, et l'interminable montée le long du périph' avant de rentrer dans le bois de Boulogne. Et là, merde alors, j'ai mal aux cuisses. Rien à voir avec un quelconque "mur du marathon" mais quand même, j'ai les guibolles qui flanchent. Dont acte. Je reste à rythme cardiaque constant, environ 160. Je fais quelques escales à 150, mais me ressaisis plutôt vite. Les coureurs autour de moi changent, mais entre ceux que je double et ceux qui me dépassent, le bilan semble équitable.

Sur ce j'entends "allez Jaja" derrière moi, et un type me double accompagné d'une moto. Mince alors, c'est vraiment Laurent Jalabert. Je caresse l'idée de l'accrocher, pour le sketche, mais je reste raisonnable. Si ç'avait été ma course de l'année, j'aurais joué mon va-tout et profité de l'aubaine pour me méga-motiver et exploser le chrono. Là, j'ai un 100 bornes dans 3 semaines, et deux relais UMT d'une cinquantaine de kilomètres à faire dans 4 et 7 jours, il n'est peut-être pas judicieux de m'arracher outre mesure, donc je reste à mon rythme, et le gars Jaja me dépose. Facile. Je pense que j'ai du ralentir et que malgré mon rythme cardiaque constant, l'usure a brisé mon beau rythme de "presque 15 km/h". Je m'en fous royalement, j'ai mon objectif au bout du fusil, je vais tomber en dessous de 3 heures, le reste n'a plus d'importance.

Enfin, au kilomètre 38,8 je passe devant la Voiture 4. J'arrose copieusement de "j'entends rien!", "c'est mou!". Je gueule à fond, je fais le guignol, et, emballé, j'accélère. Très vite, retour sur terre. Je suis à un peu plus de 170, essouflé, et je perds 10 places très rapidement. Je mets bien 200 mètres à refaire surface. Bon, c'était une bonne blague, mais j'y ai laissé des plumes.

Je fais un finish au train, sans vraiment accélérer, pas envie de bousiller la mécanique maintenant. Et enfin, le verdict tombe. 2h56'. Ouééééé, c'est gagné!

Je me soumets au contrôle anti-dopage, histoire d'améliorer la statistique et montrer que non, les coureurs ne sont pas chargés. Je n'ai pas pris de médicaments depuis des mois, j'ai mangé un très bon repas hier soir tout à fait naturel - avec un plat de résistance Ethiopien, rien de moins - donc je suis, bien entendu, négatif. J'en profite pour vous donner l'esprit de cette délicieuse recette trouvée sur Marmiton et qui s'appelle Doro Wat. Très rapidement, il s'agit de faire revenir plein d'oignon, d'échalotte et d'ail avec de l'huile d'olive, mettre de la tomate là-dedans, laissez mijoter dans une cocotte, y rajouter du poulet mariné qu'on laisse cuire 1/2 heure. Après 5 minutes de cuisson on est censé rajouter un genre d'hydromel typique du coin mais j'ai remplacé par une krô et du miel ça marche aussi. Cette cuisson finie on y plonge des oeufs à la coque percés avec une fourchette pour que le jaune prenne le goût de la sauce. C'est délicieux. Je sais pas si ça fait courir aussi vite qu'un champion éthiopien (apparemment non car j'étais pas dans le peloton de tête) mais c'est super bon et ça passe au contrôle anti-dopage.

Une fois le dépistage terminé, je suis de super bonne humeur, et je caresse l'idée de retourner au 39ème pousser la note avec la V4, mais il fait trop froid et je dois remonter jusqu'à l'Arc de Triomphe pour pouvoir sortir de l'aire d'arrivée. J'ai les jambes dures, peux à peine trotiner, je préfère faire plaisir à ma petite famille en arrivant plus tôt que prévu.

Enfin voilà. Très bonne opération, contrat rempli, je ne sais pas si je retournerai un jour sur marathon (faudrait vraiment un truc fort pour me motiver...) mais en tous cas, ce qui est fait est fait, et j'en suis très content. Pourvu que Belvès se passe aussi bien!

PS: pour info, le classement / chronométrage officiel:

  • dossard 4508
  • 672ème (362ème catégorie SH)
  • 2h 55' 13" (ça c'est le "chip time", le temps officiel est 2h 55' 35")

PPS: les temps de passage:

  5 km 00:19:34 
 10 km 00:39:58
 15 km 01:00:31
 21 km 01:25:32
 25 km 01:41:28
 30 km 02:02:12
 35 km 02:23:33
 42 km 02:55:13
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Mis à jour le mardi 29 avril 2008.